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Autour du Mont-Sainte-Odile, le Mur Païen

S’Wunderkriz von Krautergersheim

14 Novembre 2017 , Rédigé par PiP vélodidacte Publié dans #lieu

Vous quittez Krautergersheim en direction d’Hindisheim par la nouvelle piste cyclable, pratique. A un kilomètre environ du village, vous longez de vastes gravières, situées à votre droite. Le site est un rien dévasté par l’exploitation du gravier du Ried, et vous avez tendance à pousser sur les pédales. N’en faites rien ! Levez le pied ! Et observez !
Dans un minuscule jardinet, cerné par ces industries, se dresse la Croix Miraculeuse de Krautergersheim. « S’Wunderkriz »

S’Wunderkriz  von Krautergersheim
Les origines de la Croix de Krautergersheim

Pour savoir qui a fait ériger ce calvaire, il suffit de lire le cartouche en bas de l’édifice. ‘Dieses Creuz hat machen lassen Ioan Georg Walter Pfarrherr de Krautergersheim anno 1752.’ Jean Georges Walter, curé de Kraut, a fait ériger cette croix en 1752.

 

S’Wunderkriz  von Krautergersheim

Il semble que Jean Georges, comme nombre de ses ouailles, ait souffert de fièvres répétées accompagnées de frissons. Les plus fragiles s’affaiblissaient et finissaient par mourir de cette maladie appelée alors « s’Friere’ ». En fait, ces habitants du Ried étaient alors frappés par le paludisme. Les marais n’étaient pas drainés comme aujourd’hui, et les moustiques étaient fort nombreux, printemps comme été dans nos chaleurs alsaciennes. Jean Georges avait donc le palu d’où ces fortes poussées de fièvre. Lors d’un accès particulièrement violent, le curé fit le vœu, s’il en réchappait, de vouer une croix à son Seigneur.
Rétabli, Jean-Georges tint sa promesse et le calvaire fut élevé au bord de l’ancien chemin qui reliait Kraut à Hindisheim. Lorsque la route départementale fut construite en 1877, les autorités d’alors firent déplacer la croix à sa place actuelle. Sans doute pour qu’on la voit mieux.

La renommée de la Croix

Si le curé avait été guéri, le paludisme continuait ses ravages dans le Ried. Et l’histoire de la guérison miraculeuse se rependit dans les alentours. La croix devint un lieu de pèlerinage fort couru. De tous les villages environnants, les villageois venaient prier devant l’humble calvaire.
La chronique qui m’a été adressée par un fidèle lecteur indique qu’en 1923 plus de cent ex-voto entouraient la croix. Plaques peintes certes, mais aussi, bonnets, médailles, chapelets, béquilles… Le pèlerinage est resté fort longtemps très actif. Les prières ne concernaient pas seulement les fièvres du marais, mais toute sorte de demandes : accouchements, problèmes de cœur, mais aussi maladies des animaux. Il semble que la croix était surtout renommée pour traiter les affections des chevaux.
Aujourd’hui encore, lors de ma visite, j’ai pu voir médailles et bouquets accrochés à la grille du petit jardin.

S’Wunderkriz  von Krautergersheim

Preuve supplémentaire de la ferveur qui entourait cette croix, elle est portée sur la carte de Cassini, carte établie peu de temps après l’érection du calvaire.

La Croix Miraculeuse

La construction est des plus modestes, mais elle garde cette sobriété et cette simplicité qui arrêtent nos regards et suscitent notre admiration pour les artistes d’alors.
L’image du Christ couronné d’épine est marquante. L’expression de souffrance du regard est poignante.
Au pied de la croix, juste au dessus du cartouche de Jean-Georges, un minuscule bas-relief représente la Vierge à la descente de la croix. Cette sculpture naïve semble d’une autre main que l’ensemble du calvaire.

 

S’Wunderkriz  von Krautergersheim

Terminons par un souhait. Si la Croix de Krautergersheim et son histoire sont attachantes, le lieu où elle se dresse aujourd’hui ne correspond en rien à son élégance et au recueillement qu’elle devrait inspirer. Pourquoi ne pas la replacer dans son lieu originel, au bord de l’ancien chemin, au cœur du Ried ? là, ou dans un site analogue à celui que monsieur Walter, curé de Kraut, avait choisi pour elle en 1752.
Ce serait faire preuve de respect pour nos anciens.

Sources

L’essentiel de mon texte provient d’un article paru en 1984 dans la revue d’histoire locale. Ce texte fourmille de détails que je ne retranscris pas ici. J’en conseille la lecture à tous ceux qui pourront se le procurer. Je n’ai malheureusement pas le nom de l’auteur.

Photographies : PiP

 

S’Wunderkriz  von Krautergersheim
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A
Merci pour ce bien bel article.
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C
Le paludisme en Alsace ...je n'imaginais pas ! Attention avec les T° qui montent doucement il pourrait revenir !<br /> Encore une belle petite histoire...
Répondre
P
Fortes chaleurs, marécages..... c'est inéluctable.... Sais tu que 'paluds' est un vieux mot pour marécages. Chez nous, on dit le Ried.....