Visitons le Château de Landsberg !
Situé au dessus de Heiligenstein et de Barr, à mi-hauteur de la montée vers plateau de la Bloss, le château de Landsberg est un but de promenade apprécié des randonneurs et des amateurs de vieilles pierres. Posé sur un éperon de granite, visible de loin, la forteresse médiévale domine fièrement la plaine d’Alsace.
Fin du onzième siècle, Philippe de Souabe et Otton de Brunswick se disputent le trône impérial. Philippe, tenant des Hohenstaufen, veut conforter la puissance des couvents du Mont Sainte Odile. Il s’appuie sur un de ses représentants pour construire une nouvelle forteresse sur le Mont. Conrad de Vinhege érige le château de Landsberg dont sa famille prendra bientôt le nom. Nous sommes en 1197-1198. Le burg est construit sur les terres de l’abbaye de Niedermunster, le Couvent du Bas du Mont Sainte Odile. Un acte est signé de l’Abbesse Edelinde, il est daté du 23 juin 1200, il confirme la cession du terrain au chevalier Conrad.
Nous avons publié le texte de l’abbesse Edelinde, l’an passé. (cliquez sur le lien)
Ce premier château n’avait pas l’importance des ruines que nous pouvons admirer aujourd’hui. Il ne comportait qu’un donjon et un corps de logis, complété par une basse-cour. Commençons la visite des ruines par cette partie. Le donjon est construit sur un carré de dix mètres de côté. Puissant, placé en diagonale par rapport au corps de logis, il formait bouclier pour défendre celui-ci du côté de la plaine, au nord-est. En levant la tête, le visiteur découvre l’accès : une porte haute, qui était accessible par un pont volant à partir de l’étage du logis seigneurial. Tout en haut du donjon, on distingue encore les corbeaux qui portaient les hourds. Les hourds, constructions de bois, ancêtres des mâchicoulis, permettaient aux défenseurs de surplomber les assaillants du château.
Le logis seigneurial comportait un rez-de-chaussée dédié à l’usage domestique : cuisines, citerne, salle des gardes. Ces pièces basses n’étaient éclairées que par quelques meurtrières. Le premier étage était l’habitation de Conrad et de ses successeurs : la façade nord-est est largement éclairée par quatre baies géminées en plein-cintre. Les fenêtres doubles sont séparées par de fines colonnes et surmontées d’élégants occuli. Au sud-est, deux doubles baies et un magnifique oriel agrémentent la façade. Situé sur le coté de la porte du château, cet élément de décor est le plus frappant du site du Landsberg, un genre d’échauguette semi-cylindrique, portée par un cul de lampe conique. Nous serions là dans la chapelle castrale du Landsberg. Coté extérieur, deux petites sculptures ornent la base de l’oriel : une fleur de lys et un petit personnage accroupi. A l’intérieur, une frise d’arceaux délimite les petites fenêtres du chœur de la chapelle. L’une d’elles a la forme d’une croix. Admirez la finesse des dessins du chapiteau de la colonne toujours en place au droite de l’oriel !
Le château de Landsberg est situé à la limite géologique des grès, prédominants au nord, et des granites d’Andlau, côté sud. Les bases et les assises de la forteresse sont en granite, roche dure extraite du fossé creusé au nord, par les carriers du moyen âge. Les parties hautes sont en grès rose du Maennelstein, plus facile à travailler.
Ce premier château était, somme toute, de dimensions modestes. Quelques dizaines d’ années plus tard, preuve de l’importance des couvents du Mont Sainte Odile et signe de la puissance croissante de la famille de Landsberg, le site fut agrandi de façon conséquente. Nous sommes alors en 1240-1250.
L’extension se fait au nord-ouest. Les deux tours rondes et l’imposante courtine délimitent l’emprise du Château Neuf. A l’origine, cette nouvelle enceinte était détachée du vieux burg, les deux sites ne furent rattachés que postérieurement. Les tours circulaires mesurent environ sept mètres de diamètre. Leur sommet portaient des créneaux. Un chemin de ronde surmontait la courtine : il était garni de hourds et traversait les deux tours. Archères et bretèches sont toutes orientées au nord, côté montagne, là où le risque d’attaque était le plus grand.
Deux corps de logis se partageaient le site. Au sud, le bâtiment ne comportait qu’un seul étage, éclairé au sud-ouest par des fenêtres à banquettes, aujourd’hui murées. Le deuxième bâtiment, côté nord, fut construit plus tard. Composé de deux étages, il communiquait directement avec la tour nord.
L’ensemble a connu plusieurs remaniements au cours des siècles.
L’apparition des armes à feu modifie l’art de la guerre. La géométrie des châteaux doit s’adapter aux armes nouvelles : résister aux boulets et accueillir couleuvrines et canons. Tous les châteaux des Vosges n’ont pas connu cette évolution, certains, trop solitaires, trop isolés, ont été abandonnés dés cette époque. Au Landsberg, les seigneurs ont respecté le vieux burg dans sa forme initiale, mais ils l’ont adapté tout d’abord en renforçant ses murs, puis en l’entourant de nouvelles murailles. Au nord, le château neuf se voit délaissé, ses nombreuses ouvertures extérieures sont murées, à part les archères, bien entendu. Ses courtines sont prolongées pour assurer la continuité avec celles du vieux burg. Un puissant bastion est construit au sud-est. Les armes nouvelles sont mises en place : couleuvrines, poivrière portant une canonnière protégée par des vastes vantaux. Ainsi, un vaste glacis s’étend devant la forteresse. C’est en faisant le tour du château dans les fossés que le promeneur se rendra le mieux compte de la force de la place et de son adaptation aux débuts de l’artillerie.
Quelques temps, le château est passé des Landsberg au Comte Palatin, avant de revenir à la famille qui resta maître des lieux jusqu’à la Révolution.
On ne trouve guère de textes relatant l’histoire du château de Landsberg dans les temps troublés que connut l’Alsace. Lors de la Guerre du Bundschuh, les paysans révoltés s’étaient installés dans la prévôté de Truttenhausen, toute proche. Cependant, rien ne dit que les Rustauds aient attaqué le château. Lors de la Guerre de Trente Ans, il semble que les troupes de Mansfeld, puis les Suédois se soient plutôt attaqués aux riches villes de la plaine, comme Obernai, oubliant les forteresses de montagne, déjà devenues inutiles. Cependant, le château est décrit comme ruiné au milieu du XVIIème siècle.
Depuis longtemps, les Landsberg avaient délaissé le burg de leurs ancêtres pour lui préférer leur résidence de Niedernai, située en plaine. Le château fut confié à des gardes, puis servit de ferme. Aujourd’hui, les ruines du Landsberg sont une propriété privée. Merci à vous de respecter le site.
Dans la basse cour du château fleurit au printemps, l’éranthe d’hiver. Sa floraison ne dure que quelques jours. Cette petite fleur jaune est rare sous nos climats. De son nom latin ‘Eranthis hyemalis’, l’éranthe est originaire d’Italie ou de Turquie. La légende nous dit qu’elle aurait été rapportée des croisades par un sire de Landsberg. Elle serait un remède à la mélancolie.
Les automobilistes pourront garer leur véhicule sur le petit parking situé à l’ouest d’Heiligenstein. Ils gagneront Truttenhausen sur la petite route à travers prés. Un sentier du Club Vosgien ( disque bleu ) monte vers les ruines.
Les marcheurs préfèreront effectuer une boucle à partir de Saint-Jacques, par exemple. Saint-Jacques, Kapellenhausfelsen, Ameisenberg, Landsberg ( balisage : triangle bleu ) avec un retour sur Saint-Jacques par le sentier sans dénivelé ( rectangle : bicolore rouge et blanc).
A moins qu’ils ne préfèrent rechercher les pierres sculptées du Chemin des Chameaux. (cliquez sur le lien ), ou découvrir la Chapelle du Frère Léon dans la vallée de la Kirneck.
- Photographies du château de Landsberg ( BrR, FrP et PiP)
- Schéma des ruines ( PiP)
- L’Orgueil, Herrade de landsberg, Hortus Deliciarum
- Les Ruines du Landsberg, aquarelle de Osterwald, 1873
Quelques images du Landsberg