Photographies anciennes autour du Mont Sainte-Odile
Sous le titre ‘Le Mont Sainte-Odile et ses promenades’, Charles Umbricht publie en 1904 puis réédite en 1909 un opuscule destiné aux pèlerins et promeneurs du Mont. Description des couvents, itinéraires de promenades, de randonnées, description des lieux, le petit ouvrage et ses multiples illustrations ne peuvent qu’éveiller notre intérêt.
Dans cette période où on parle beaucoup de patrimoine, nous nous attacherons en fin d’article à détailler quelques images qui nous montrent des éléments d’architecture aujourd’hui disparus aux châteaux d’Ottrott.
Charles, né de parents obernois, est élevé dans la religion catholique. Jeune homme, il entre au noviciat des Pères Blancs à El Harrach, ex Maison Carrée, dans la banlieue d’Alger. C’est lors d’une de ses visites à Obernai que Charles rédige son livret.
Lors de la Grande Guerre, Charles s’engage dés 1914. Sa conduite lors des combats lui vaut de nombreuses citations, la Croix de Guerre et la Légion d’Honneur. Il est blessé et amputé d’un bras en 1918. Devenu aumônier militaire après la guerre, Charles réside souvent à Obernai.
Charles semble s’être énormément attaché au Mont Sainte-Odile. Ce devait être un grand marcheur. Les quelques deux cents pages de son petit ouvrage nous le démontrent à chaque instant.
Charles Umbricht
Actuellement, une exposition retrace la vie de Charles et son parcours dans l’église d’Obernai (jusqu’à fin septembre 2024).
Le texte de notre aumônier est facile à lire, agréable. Charles retrace tout d’abord, naturellement, la vie d’Odile. Charles se base sur les multiples sources en sa possession. Le récit reprend certes la Vita Odiliae, mais est complété par les épisodes plus tardifs : le séjour chez la nourrice à Scherwiller, la légende de la Source miraculeuse, la fuite en Forêt Noire… Le personnage d’Adalric, père d’Odile, est adouci ; la mort tragique d’Hugues est passée sous silence. Charles ne tient visiblement pas à offusquer voir effrayer le pèlerin.
Une deuxième partie retrace l’histoire des couvents. Ensuite, Charles conseille et décrit ses promenades.
Retracer les itinéraires et les conseils de Charles aux marcheurs serait bien illusoire et vain. Les temps ont bien changé, les sentiers ont évolué, les haltes dans les auberges d’antan prêtent à sourire.
Retenons cependant le plan d’accès publié par Charles.
Le plan d’accès au Mont Sainte-Odile
Nous sommes en 1909 : la voie de chemin de fer Rosheim-Ottrott-Saint-Nabor transporte encore des voyageurs jusqu’au pied du Mont. De même, la ligne Erstein-Obernai-Ottrott est alors encore en service. Le service public était alors à l’honneur ! Les Strasbourgeois pouvaient parcourir la campagne, à l’abri de la pollution automobile.
Plus amusant, la ligne de tramway électrique Barr-Le Hohwald avec embranchement vers le couvent du Mont Sainte-Odile est indiquée. Ce projet bien réel au début du XXème siècle n’a jamais été réalisé. Dommage ! Aujourd’hui, on entend parler d’un téléphérique… Pff, comme Charles Umbricht, marchons sur les sentiers du Club Vosgien !
Le couvent occupe une bonne part du livre. Si les photographies du couvent sont nombreuses, nous ne les reprendrons pas ici, les lieux sont bien connus et les images de Charles ne nous apprennent pas grand-chose. Nous conseillerons aux personnes intéressées par les vues anciennes le livre de Jean-Marie Le Minor et d’Alphonse Troetsler, ‘Album du Mont Sainte-Odile’, publié par I.D. L’Edition.
Les Sœurs étendaient le linge sur les prés sur le Mont en 1909
Nous nous en tiendrons pour notre part à des lieux moins photographiés à cette époque.
Note : Les photographies sont en noir et blanc, bien entendu. Elles sont dans le livret de Charles en tout petit format. Nous avons fait de notre mieux pour vous les rendre lisibles.
Le Mur Païen à proximité du Rocher Saint-Nicolas
La Felsentor, vue de l'extérieur du Mur
Si Charles avait connaissance du système tenons-mortaises, sa proposition sur la datation du Mur, reflet de l'époque, est pour le moins hasardeuse.
Les images proposées sont nombreuses, nous avons choisi pour vous les plus marquantes.
La grande baie du Dreistein oriental
L'arche du Diable, au Hagelschloss
Le lecteur connaissant les lieux remarquera que l'arche portait encore un mur d'une hauteur de plus d'un mètre cinquante. Aujourd'hui, il n'en reste rien, l'arche est nue et menacée d'un effondrement prochain.
Kagenfels, la tour de flanquement
Le site est alors totalement envahi par la végétation. Aujourd'hui, la ruine est entretenue et restaurée par une association de bénévoles fort sympathiques et efficaces. La tour de flanquement reste cependant à sauver.
Le Koepfel
Château de Landsberg
Oriel et porte haute du Château de Landsberg
La croix Schott
Le lecteur intéressé par l'assassinat de Catherine Schott se reportera à notre article. (cliquez ici)
L' abri sous roche de l'Elsberg, avec son panorama sur la plaine d'Alsace
Le kiosque de l'Elsberg
Le plateau des fées : la Hexenplatz
La voie dite 'romaine', sous la porte d'Ottrott
La portion pavée visible était alors bien plus importante qu'aujourd'hui.
Venons en à un sujet qui nous est cher : les châteaux d'Ottrott. Nous avons commis quelques articles dédiés à ces ruines magnifiques (cliquez ici) . Observons les images proposées par notre ami Charles.
Cette vue générale a souvent été diffusée sous forme de carte postale. Le site était occupé par les vergers et prairies de la Maison Forestière. Aujourd'hui, la forêt à repris ses droits.
Remarquons tout à droite la maison du Lutzelbourg qui sert aujourd'hui de base aux Amis des Châteaux d'Ottrott. La toiture quatre pentes, les deux étages bien marqués, le chemin d'accès direct à partir de la maison forestière, les lieux ont bien changé.
Sur le donjon-palais du Rathsamhausen, la grande brèche est ouverte à tout vent. La photo a été prise quelques années avant la parution du livre. 1896 ou 97 ?
Plus étonnant, sur la gauche de l'image, indiquée par une flèche rouge, une ouverture s'ouvre dans le mur (~1300). Située à cet endroit, il ne peut s'agir d'une fenêtre. Vraisemblablement, nous sommes en présence d'une niche de tir qui surveillait la porte au pont-levis. D'après les dimensions, je pencherais pour une arbalétrière, comme nous en avons dans le château voisin de Lutzelbourg.
Cette niche ainsi que le sommet du mur 1300 ont aujourd'hui disparu.
Entrée actuelle du Rathsamhausen, avec l'emplacement de l'arbalétrière
Une aquarelle d'Emile Audiguier (1880) indique également la présence de cette niche. Le relevé de Winckler (1880) mentionnait lui aussi cette ouverture.
Château de Lutzelbourg, versant ouest
Cette vue du donjon et des deux murs boucliers à partir du plateau central du site montre que le site a peu évolué. Seul l'angle nord du mur bouclier s'est effondré : il atteignait alors sa hauteur initiale.
La rampe d'accès au Lutzelbourg
Les deux murs qui délimitaient la rampe sont plus élevés qu'aujourd'hui, certes. Mais l'élément nouveau est la fente de tir ou le fenestron qui apparait en bas de la rampe sur le mur ouest (voir flèche). Il semble, de façon étonnante, que cette ouverture était la seule en place sur la longueur de la rampe.
De ce poste, un garde pouvait surveiller la plateforme intérieure des lices du Lutzelbourg. Nous nous serions attendus à une ouverture analogue sur l'autre versant de la rampe.
Le logis du château de Rathsamhausen, façade sud, côté intérieur
Sur cette image, les deux baies gothiques et les deux baies rectangulaires sont encore bien présentes, en bon état. Las, depuis cette prise de vue, le logis du Rathsamhausen a beaucoup perdu. Il s'agit sans doute de l'élément le plus en péril des ruines. Jugez par vous même.
Etat actuel de la façade sud du logis du Rathsamhausen
Terminons par l'intérieur du Donjon-palais
Donjon-palais du Rathsamhausen, angle nord-est
Fort heureusement, nous n'avons, à ce jour, pas perdu les éléments les plus marquants des châteaux d'Ottrott : la porte ouvragée et la cheminée à colonnettes du début du XXIIIème siècle. Einmalig!
Vous devriez venir les voir. Visites guidées du donjon-palais, les mardis matin et les samedis.
PiP
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Ce petit livre de Charles Umbricht a été ‘découvert’
par mon ami Jean-Luc qui a eu la gentillesse de me l’offrir.
Qu’il en soit remercié ! Merci Jean-Luc !
Jean-Luc, antiquaire et bouquiniste passionné
2 Cour des Artisans à Obernai.
https://www.alsapassions.fr/
Publicité imprimée dans le livret de Charles Umbricht
Note : Charles est représenté sur la fresque de Sainte Odile dans la chapelle située sur la droite de la nef de l'église d'Obernai. Il porte son habit noir d'aumônier et est situé à main gauche d'Odile.